Selon les données du CIM (Centre d’Information sur les Médias), organisme créé par les publicitaires, les annonceurs ont investi plus de € 2,8 milliards en publicité dans les grands médias en 2006.  Sans surprise, la TV arrive en tête des médias ayant « bénéficié » des investissements publicitaires (34,4%), suivie des quotidiens (24,5%), de la radio (11,4%), des magazines (10%) et de l’affichage (7,9%). Ce montant ne concerne que les grands médias.  La somme totale consentie pour les dépenses publicitaires est elle plus élevée encore même si elle est difficile à évaluer avec exactitude. 

En 2004, selon le même organisme, ce montant était de € 1.6 milliards ce qui fait une progression de 75% en 2 ans. Cette somme représente aujourd’hui pour la première fois plus de 1% du PIB, un PIB qui bien évidemment ne progresse pas au même rythme.

Le consommateur paye la facture

Ainsi que diverses études l’ont montré, la somme que les industriels consacrent à la publicité de leurs produits est directement répercutée sur le prix de ceux-ci.  En d’autres termes, même s’ils en sont peu conscients, ce sont les consommateurs qui payent la facture, forme insidieuse de « cotisation publicitaire ».  Et celle-ci n’est pas mince puisqu’à la lumière des derniers chiffres, elle s’élève à environ € 300 par personne et par an. 

Un comparatif un peu effrayant

L’adage populaire veut que comparaison ne soit pas raison.  Il est toutefois significatif de comparer cette somme aux budgets de secteurs importants de notre état. Un petit coup d’œil sur le budget fédéral 2006 permet par exemple de se rendre compte que nous cotisons beaucoup moins pour la justice (€ 1.4 milliards) ou la coopération au développement (€ 1.3 milliards) que pour cet outil de formatage de nos désirs et de nos besoins.

Il est piquant de constater également que nous « cotisons » même d’avantage pour cette armée de la pensée unique que pour la grande muette (€ 2.7 milliards) ou pour la police fédérale (€ 1.5 milliards).

Un cercle vicieux

Nous sommes actuellement dans un cercle vicieux : {La publicité crée artificiellement l’envie d’acheter chez le consommateur. Elle est payée par celui-ci « à l’insu de son plein gré ».  Elle gonfle ventes et bénéfices des entreprises.  Celles-ci utilisent cette manne d’argent pour réinvestir dans encore plus de budgets publicitaires.} 

Les conséquences de cette logique boulimique sont catastrophiques : surproduction, surconsommation, endettement,…  Plus le budget publicitaire augmentera, plus les conséquences sociales et écologiques seront importantes, plus également la pression que le monde marchand exerce sur nos médias sera importante, plus enfin la marchandisation de chaque parcelle de notre société s’accentuera.

Quelques pistes

On a beau jeu d’arguer de la liberté individuelle, celle-ci est dans les faits bien fragile face à l’armada des publicitaires.  Noam Chomsky a parlé de {liberté de choisir entre Coca-Cola et Pepsi}. Pour sortir de la logique actuelle, il est important que l’Etat s’interpose entre les citoyens et les publicitaires.  Il s’agit de libérer le citoyen de la pression publicitaire qu’il subit au quotidien. Il existe pour ce faire deux pistes importantes et complémentaires:

  • Réglementer strictement la publicité.

Interdire la publicité dans les lieux publics (voirie, écoles, gares, moyens de transport public,…), interdire la publicité à destination des plus jeunes et contrôler son contenu grâce à des organismes indépendant.  A cela il faudrait sans doute ajouter l’interdiction pure et simple de la publicité pour certains produits socialement et écologiquement nuisibles (4×4, crédits, vols low-cost,…), au même titre que pour le tabac. 

  • Mutualiser les bénéfices.

Une fois le budget qu’ils allouent aujourd’hui à la publicité amputé par des mesures de réglementation sur la publicité, les entreprises choisiront soit de diminuer le prix de leurs produits, soit d’augmenter leur marge bénéficiaire.  En raison de la (salutaire) diminution du volume des ventes que de telles mesures devraient causer, il est fort probable qu’ils opteront pour la seconde option. Afin d’éviter ce cas de figure et en vue de réaffecter à des projets utiles cet argent, il est important de prévoir une taxe spéciale sur les bénéfices des entreprises. 

Les sommes ainsi récoltées pourraient être directement réinvesties dans les médias publics, l’aide à la presse et l’éducation.

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