Il y a de cela quelques semaines, au détour d’une discussion, un ami me disait “Veinard, tu vas avoir une ligne directe depuis Bressoux avec les nouveaux trains de la SNCB”. Du côté des médias, c’est le même enthousiasme et l’on parle depuis plusieurs jours des « nouvelles offres de la SNCB ». La réalité c’est que la diversité de l’offre à partir de ma petite gare locale diminue et qu’il n’y a rien de nouveau sous la pluie mais seulement la poursuite de la logique « grandes lignes » de la SNCB.
Afin d’étayer ma critique, j’aimerais prendre un exemple intéressant que je connais bien, le mien. J’habite Jupille (à proximité de la gare de Bressoux) et je travaille à Louvain (Leuven). Il y a de cela plus de 2 ans, j’ai décidé de revendre ma voiture pour passer au vélo (Forcément « pliable » puisque la SNCB (pas plus que le TEC) ne prévoit pas de solution pour les vélos. Enfin, il existe bien un exorbitant billet spécial vélo mais cette « solution » requiert en outre une excellente condition physique afin de courir jusqu’au contrôleur avec le vélo, puis avec celui-ci jusqu’au wagon dans lequel un espace est prévu en tête ou queue de train (et ce au départ comme à l’arrivée). La poussée d’adrénaline est garantie, j’ai essayé ! ) et au train.
Avant ce 10 décembre, il existait un train partant de la gare de Bressoux (En fait, il s’agit uniquement d’un « arrêt » le gare ayant été fermée et les voyageurs peuvent soit attendre le train dehors (il n’y a même pas de d’abri contre les intempéries) soit dans le passage sous les voies où règnent alternativement des effluves de vomis et de déjections humaines (ce lieu étant devenu un refuge notoire pour toxicomanes)) à 7:55 et arrivant à 9 :00 à Louvain via l’ancienne ligne Liège-Bruxelles. Il a été supprimé au départ de Visé et Bressoux. La gare de Bressoux était également desservie par un train local en direction de Liège-Guillemins toutes les heures 34 assurant une bonne correspondance avec le train rapide de l’heure 58 pour Louvain et Bruxelles (un quart d’heure de battement souvent réduit à 5-10 minutes en raison du retard assez chronique du train local). Ce train a été supprimé et remplacé par une des fameuses « nouvelles offres » à savoir un train IC assurant la liaison Maastricht-Bruxelles via la voie rapide et s’arrêtant à Visé- Bressoux et Liège. Minuscule inconvénient, celui-ci ne s’arrête pas à Louvain me laissant juste le choix d’un très risqué saut du train en marche en gare de Louvain (Surtout avec mon vélo pliable en main). Vu l’affluence du train local Maastricht-Visé-Liège, UN train local a été maintenu à 7:43 (au lieu de 7:34). La correspondance est maintenant excellente avec le train de 7:58, tellement bonne d’ailleurs que sur les deux premiers jours, nous sommes arrivés deux fois après 7:58 et que seul le retard du train de Bruxelles nous a permis d’avoir le train. Ce jour, le train de 7:58 était soit dit y en passant bondé car le nouveau train Maastricht-Bruxelles après avoir eu un quart d’heure de retard lors de son jour d’inauguration était tout simplement en panne aujourd’hui. Si l’on a un bon plan marketing du côté de la SNCB et que l’on prend soin d’annoncer aux médias bien à l’avance les « nouvelles offres », on a par contre oublié de tester les locomotives plus d’une semaine à l’avance or, celles-ci supportent mal la tension différente (1500V) sur le réseau hollandais.
Ce petit exemple (J’en ai déjà collecté quelques autres comme par exemple le fait que le train rapide vers Liège passant Louvain à 18:06 et qui faisait omnibus vers Gouvy à partir de Liège desservant entre autre les gares d’Angleur, Tilff, Mery, Hony et Esneux ne s’arrêtera plus non plus à Louvain.) illustre bien la philosophie actuelle de la SNCB qui est le « tout aux grandes lignes ». Il est louable d’augmenter l’offre vers la capitale afin de désengorger celle-ci mais la mission de service public de la SNCB n’est pas seulement de répondre à cette demande massive (et rentable) vers la capitale mais aussi d’offrir à chacun la possibilité de choisir le train plutôt que la voiture où qu’il habite et travaille. En concentrant son énergie sur les grandes lignes, et particulièrement sur Bruxelles, la SNCB abandonne sa mission de service public qui ne peut être régulée uniquement par la loi de l’offre et de la demande mais aussi et surtout par l’obligation d’offrir des alternatives pour toutes et tous en fonction de l’intérêt collectif.
Il s’agit de proposer des solutions afin de faire naître des alternatives (fussent elles peu rentables à court terme suivant les seuls critères marchands), d’impulser d’autres habitudes plus écologiquement responsables qui ne soient pas pénalisantes dans la vie quotidienne (temps de transport excessifs). Bien évidemment, au sein l’UE actuelle où la libre concurrence est élevée au rang de valeur et où tout est marchandise (même les choix en matière de transport), la SNCB est placée aujourd’hui dans un carcan financier qui l’oblige à faire ces choix aux dépends de ses usagers mais aussi de l’intérêt collectif. En effet, en appauvrissant encore l’offre à partir des petites gares périphériques, la SNCB incite à l’usage de la voiture. Au mieux, les combinaisons voiture-train ou bus-train demeurent envisageables mais l’alternative la plus verte, celle qui combine le vélo et le train, est rendue plus difficile car les moyennes distances sont négligées au profit des grandes lignes. En imposant de fait à la SNCB ce choix stratégique, les autorités renoncent à remplacer progressivement la voiture par d’autres modes de transport moins polluants comme le train mais choisissent plutôt d’occuper avec celui-ci un « segment » du marché. Il n’est plus question comme le clamait une campagne de pub de la SNCB, de nous faire « oublier la route ».
On ôte des lignes locales et les remplace par des RAVELs. On ferme les petites gares. On y diminue l’offre. Faire rouler un train coûte cher mais le prix que nous devrons payer collectivement pour la gabegie actuelle et ses conséquences écologiques sera sans commune mesure.
Si vous souhaitez témoigner de votre mécontentement, il existe un site pour vous « soulager » : ici