Il n’est pas toujours rectiligne le chemin de la militance, comme n’est pas rectiligne celui de nos vies. Mais pour qui ne renonce pas à ses idéaux, chaque étape est apprentissage et nourrit la suivante, en cohérence. A titre personnel, s’il est une conviction qui grandit chaque jour davantage et guide mon engagement, c’est qu’il est crucial de faire cohabiter harmonieusement nos utopies et notre quotidien. Combien de militant(e)s épuisés à prêcher le « Grand Soir » ? Combien faisant un grand écart entre discours et pratiques ? Mettre en résonnance nos actes quotidiens et la société à laquelle nous aspirons, agir comme nous pensons, décoloniser pas à pas nos imaginaires de la dynamique mortifère et bêtifiante de cette société de l’argent roi, construire des alternatives locales ici et maintenant, le faire avec d’autres, conscient de la richesse du collectif dans ce combat quotidien. In fine, dans la jolie formule « Penser global, agir local » de l’écologue René Dubos, le « local » sur lequel il nous faut agir, c’est également chacun(e) de nous. Et dans le même temps, il s’agit de ne pas perdre l’objectif d’embrasser et de transformer le monde pour plus de justice et d’humanité. A défaut, nous nous perdons également dans des pratiques autarciques qui nous isolent, nous désolidarisent.
Or donc, avec d’autres toujours davantage convaincus eux-aussi de cette nécessité de cohérence, nous avons remis l’ouvrage sur le métier. Or donc est né le Mouvement Demain. Demain n’est pas un parti de plus car c’est techniquement la fusion de deux formations (le Mouvement VEGA et le Mouvement de Gauche). Mais c’est davantage qu’une simple fusion car c’est également l’occasion de questionner notre façon de fonctionner. Ce n’est pas même un parti au sens strict (mais bien un mouvement) même si nous n’entendons pas déserter le champ électoral. Moyennant certaines limites, on peut même être membre de ce mouvement politique en même temps que d’une autre formation de gauche. Demain n’a d’ailleurs pas un nom qui « sonne très parti ». Demain c’est l’idée d’un horizon positif possible hors du capitalisme, ce qui fait souvent défaut chez les écologistes catalogués comme porteurs de mauvaises nouvelles. L’esprit de cette formation d’un genre nouveau, pratiquant la parité absolue et le tirage au sort en son sein ? Créer un creuset où puissent penser en commun celles et ceux qui font la gauche rouge verte. Faire se rencontrer les utopies et les pratiques résilientes, la théorie et les pratiques. Demain porte le projet de réimbriquer l’économique dans un projet de société, et de penser ce projet de société autour de trois valeurs cardinales : la justice sociale (que portait le projet socialiste initial), le respect des limites de la biosphère (et donc le renoncement au productivisme inhérent à la logique de profit), et une démocratie radicale (passant par une implication citoyenne effective et une relocalisation des lieux de décision). Parce qu’il faut un nom à ce projet, nous l’appelons « écosocialisme » même s’il n’a rien de commun avec l’acception actuelle du terme « socialisme », et même s’il n’est pas un simple socialisme teinté de vert. Sommes-nous là pour diviser la gauche ? Nous souhaitons à la fois créer un espace politique propre qui nous semble ne pas exister et servir de trait d’union pour celles et ceux qui pensent comme nous que la gauche doit se refonder pour constituer une alternative crédible à la société capitaliste.
On m’a souvent demandé comment pouvait cohabiter ma vie professionnelle de chercheur, celle de papa de trois enfants et mes engagements politiques et citoyens. A la vérité, pas toujours facilement même si chaque pan de cette vie bien remplie est source d’enrichissements. J’ai décidé de m’investir dans le lancement de l’aventure Demain. Mais je suis de cette aventure politique, qui est également une aventure humaine, avec la volonté de devenir rapidement un passeur, notamment parce que j’ai la conviction chevillée au corps que la gauche c’est la puissance collective et qu’il y a dans le groupe qui se construit toutes les ressources nécessaires, parce que la vie n’est pas rectiligne. Chacune et chacun d’entre vous peut constituer demain un maillon nouveau de cet ouvrage collectif. A la mesure du temps dont il ou elle dispose, de l’expérience qui est la sienne.
Pour qui ne renonce pas à penser en humain libre, le chemin n’est pas rectiligne. Mais au fond n’est-ce pas là sa richesse ? Dès lors, longue vie au Mouvement Demain, au chemin nouveau qu’il ouvre, nourrit de notre passé mais ouvert sur ce qui est, sur ce qui viendra, ce que nous avons à construire !
Vous voulez être de l’aventure ? Juste curieux ? Une première rencontre sur Liège prévue le 24 mai à 19h au 49 de la rue Surlet. Adelante !